Apologie de la fuite (3/8) – Julie et Gilles

Troisième nouvelle d’une série de huit qui voit l’apparition successive de sept couples différents dont vous pouvez vous amuser à décrypter les ennéatypes pour pratiquer l’ennéagramme.

Des indications sont données en fin d’article, mais essayez de trouver par vous-même.

2 septembre 2019 – Julie et Gilles

  Julie s’était laissé attacher les pieds sans broncher. C’était la première fois qu’elle s’adonnait à ce genre d’expérience un peu particulière. C’est Gilles, son compagnon qui l’avait convaincu d’essayer. Au début, elle avait hésité, se demandant si faire ce genre de chose ne la classerait dans la catégorie des personnes un peu déséquilibrées. Puis, Gilles avait insisté, il en avait vraiment envie et elle voulait lui faire plaisir. De toute façon, elle lui faisait confiance et savait que rien de fâcheux ne pouvait lui arriver.

Le harnachement qui lui avait été enfilé la serrait un peu et lui cisaillait un peu l’entrejambe. Elle se décontracta pour laisser la douleur s’échapper et se dit que finalement, même si tout cela était, pour ainsi dire assez original, elle allait y prendre un maximum de plaisir. C’était mieux de se dire cela que de laisser la peur s’infiltrer.

Gilles gloussait d’un plaisir non dissimulé en admirant sa compagne dans son nouvel accoutrement. Il était persuadé qu’en sortant des sentiers battus, ils allaient prendre un « maxi-pied » qu’ils ne seraient pas près d’oublier. Comme lui aussi devait commencer à enfiler la tenue spéciale pour l’événement, il passa le relais à Claude pour filmer la scène. Tous les amis de Julie et Gilles, conviés pour l’occasion, étaient surexcités et attendaient le début des festivités.

Julie baissa les yeux. Elle se demandait quel danger tout cela pouvait éventuellement représenter. Elle n’était pas du genre à avoir peur. Plus c’était dangereux, plus elle fonçait tête baissée. Cette façon, d’être, l’amenait à avoir une relation assez particulière avec l’autorité. Elle s’y opposait souvent et se rangeait systématiquement du côté de ceux qu’elle pensait en être victime. Mais ses valeurs de loyauté faisaient que lorsqu’elle avait confiance en quelqu’un, elle le suivait aveuglément. C’était le cas de Gilles.

Gilles lui, aurait fait n’importe quoi par goût du défi. Aujourd’hui, il voulait faire quelque chose d’extraordinaire, quelque chose que les gens communs ne faisaient pas. Oser cette aventure, en plus devant tout le monde, l’excitait au plus haut point. Il allait pouvoir ressentir des sentiments de victoire. Tous ses amis sauraient qu’il n’était pas un dégonflé et sa compagne non plus.

C’était maintenant le moment où il allait falloir se lancer. Julie semblait prête. Elle regarda Gilles, comme pour lui demander « Tu es sûr ? ». Il lui fit un clin d’œil qui la rassura.

Elle regarda de nouveau ses pieds, puis projeta son regard droit devant elle avant de se lancer pour de bon. Elle poussa un cri effroyable qui glaça le sang de toute l’assemblée. Claude, qui filmait d’en haut, ne put retenir un mouvement de recul qui fit sortir Gilles du champ. Gilles s’agitait dans tous les sens. Chacun retint son souffle et des mains se crispèrent sur des cuisses.

Tous se précipitèrent pour observer le lit de plus près et voir si Julie allait bien. Les cris se transformèrent en rire et on entendit Julie crier : « C’est trop génial ! »

Après une chute de 35 mètres dans le vide depuis le parapet, Julie oscillait doucement au bout de son élastique. Elle fut descendue jusqu’au lit de la Vaudelle et on la débarrassa de tout l’équipement de saut qui lui avait été installé en haut du pont. Elle remonta pour assister au saut de Gilles qui sans hésiter sauta en criant « Banzaï ! ».

L’organisateur remis des jolis documents aux deux jeunes gens qui certifiaient que le 2 septembre 2019, ils avaient réussi le saut à l’élastique du viaduc de Saint Georges le Gaulthier.

Comme ils étaient les dix millièmes personnes à sauter, il leur remit aussi une lettre leur annonçant qu’ils avaient été sélectionnés pour participer à un jeu de téléréalité dans lequel ils pouvaient gagner une île, d’une valeur de deux millions d’euros. Dans le courrier, il leur était donné rendez-vous dans quatre jours au port de Lézardieu pour embarquer, avec les huit autres participants sélectionnés, pour l’île de Roch Brocéliande. Il était indiqué que lors d’un dîner, pendant lequel ils seraient filmés, on leur donnerait le règlement à signer et on leur expliquerait les modalités du jeu.

Julie et Gilles sautèrent de joie à l’annonce de cette excellente nouvelle. Pendant le trajet de retour pour Laval, ils exultaient dans la voiture, à grand renfort de « Yes ! », et de « Génial ! », laissant les automobilistes, qui les doublaient sur l’autoroute, un peu dubitatifs. Gilles était aux anges et se disait que le succès n’arrive qu’à ceux qui le méritent, tandis que Julie était ravie de pouvoir partager ce moment de liesse avec celui qu’elle adulait.

Entre l’extériorisation des émotions qu’ils venaient de vivre et cette étrange sélection pour participer à un jeu, les discutions furent animées. Pour Gilles, le challenge avait déjà débuté. Il se demandait quelle serait la meilleure stratégie pour gagner l’île. Pour lui, c’était une évidence il allait remporter le trophée. Pour Julie, les choses étaient un peu plus compliquées. Il lui manquait beaucoup trop d’information pour se faire une idée claire de ce qui allait se passer et ça l’angoissait un peu.

Elle se mit à bâtir une multitude de scénarios sur ce qui les attendait, tentant d’y apporter des réponses par avance. Tandis que chaque difficulté évoquée renforçait l’esprit de compétition de Gilles qui se projetait en vainqueur, les angoisses de Julie se renforçaient. Mais comme d’habitude, elle serait en équipe avec son héros, alors elle se sentit, par avance, en sécurité pour partir dans cette aventure, rassurée par les envolées lyriques de Gilles qui lui décrivait comment il allait triompher de ses futurs adversaires.

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Alors vous avez trouvé ?

Je n’en doute pas.

 

Gilles est du profil trois en ennéagramme :

Fixation mentale : Prouver sa valeur « Gilles lui, aurait fait n’importe quoi par goût du défi »,  » il voulait faire quelque chose… que les gens communs ne faisaient pas », « … Gilles qui se projetait en vainqueur », « Gilles … décrivait comment il allait triompher de ses futurs adversaires. »

Quête : des succès visibles « Il allait pouvoir ressentir des sentiments de victoire »,  » Tous ses amis sauraient… »

Mécanisme d’évitement : La vantardise, la vanité « Gilles … se disait que le succès n’arrive qu’à ceux qui le méritent », « Pour lui, c’était une évidence il allait remporter le trophée »

Orientation : La compétition « le challenge avait déjà débuté », « Il se demandait quelle serait la meilleure stratégie pour gagner », « chaque difficulté évoquée renforçait l’esprit de compétition … »

Julie est du profil six  :

Contre-passion : la témérité : « Elle n’était pas du genre à avoir peur. Plus c’était dangereux, plus elle fonçait tête baissée » qui traduit la réaction égotique contre la peur ressentie au plus profond de soi que l’on ne veut pas voir (6 contre-phobique).

Fierté : La loyauté. « Mais ses valeurs de loyauté faisaient que lorsqu’elle avait confiance en quelqu’un, elle le suivait aveuglément. », « de toute façon, elle lui faisait confiance « 

Orientation : S’inclure dans des actions collectives « elle se rangeait systématiquement du côté de ceux qu’elle pensait en être victime »

Mécanisme de défense : suspicion , projection psychotique « Il lui manquait beaucoup trop d’information pour se faire une idée claire », « « Cette façon, d’être, l’amenait à avoir une relation assez particulière avec l’autorité. », « Elle se mit à bâtir une multitude de scénarios sur ce qui les attendait, tentant d’y apporter des réponses par avance »

Passion l’angoisse « ça l’angoissait un peu », « chaque difficulté évoquée … les angoisses de Julie se renforçaient »

Mécanisme d’évitement : Le doute, remise en question « Elle se demandait quel danger tout cela pouvait éventuellement représenter. », « Elle regarda Gilles, comme pour lui demander « Tu es sûr ? ». 

Désir de base : Trouver du soutien « Il lui fit un clin d’œil qui la rassura. »

Fixation mentale : Etre en sécurité, « elle serait en équipe avec son héros, alors elle se sentit, par avance, en sécurité »

 

La relation entre six-femme et trois-homme

Selon certaines études statistiques (qui restent à prendre avec prudence), même si toutes les combinaisons ont été relevées, une femme de profil 6 serait plutôt attirée par un homme de profil 8 ou 3 (source 9types.com).

En ce qui concerne Julie et Gilles leur association peut trouver une explication dans la complémentarité de leur opposition. Gilles rassure les angoisses de Julie par un dynamisme et une efficacité dans l’action qui sort Julie de ses pensées projectives non réalisées. A contrario, Julie freine un excès de confiance de Gilles par ses remises en cause constantes.

Un autre point à noter est que le profil 6 est le profil d’intégration du 3, montrant ainsi une voie vers la prise en compte d’une nécessaire sociabilité afin que le trois s’intègre, en délaissant une orientation trop marquée pour l’action individuelle.

A l’inverse le profil 3 étant le chemin de désintégration du profil 6, le six peut être attiré vers la passion de mensonge du 3 qui lui montre une voie plus facile, mais moins vertueuse, que celle du courage pour sortir de sa passion d’angoisse. C’est d’ailleurs le cas de Julie qui préfère devenir téméraire pour masquer sa peur intérieure.

 

A bientôt pour un autre couple d’ennéatype.

 

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